Séance unique le Jeudi 12 Mars à 20H30 à Utopia Saint-Ouen l’Aumône à l’initiative du mouvement N.D suivie d’un débat sur le thème :
Changer les choses, ici et maintenant, à différentes échelles. Avec un(e) représentant(e) de l’ambassade d’Equateur, d’Isabelle Attard députée N.D . Soirée soutenue par le Parti de Gauche
ECUADOR, UNE POLITIQUE AU-DELÀ DE L’UTOPIE
Jacques SARASIN – documentaire France 2012 1h12mn –
Du 12/03/15 au 12/03/15
Dans l’imagerie médiatique des expériences socialistes, on a surtout retenu l’aventure au Venezuela du regretté et tonitruant Hugo Chavez, poursuivie depuis par le certes moins charismatique Nicolas Maduro, et celle du bolivien Evo Morales, dont les origines indigènes ont fait un personnage atypique et télégénique. On parle beaucoup moins, voire pas du tout, de celle de l’équatorien Rafael Correa, économiste de renom parvenu démocratiquement au pouvoir présidentiel depuis 2006 avec un programme tout autant à gauche que ses voisins andins amazoniens. L’omerta médiatique qui a accompagné sa visite en France fin 2013 est d’ailleurs l’objet d’un projet de film de Pierre Carles, toujours prompt à juste titre à montrer la partialité des médias prétendument indépendants.
Le documentaire de Jacques Sarasin a donc l’immense mérite de se plonger dans cette aventure politique et humaine qui semble vouloir durer et être soutenue par la majorité d’un peuple. On pourra certes reprocher l’absence de points de vue contradictoires : seul un économiste de droite, tellement caricatural qu’il en est ridicule, prédit l’apocalypse, et une veuve rappelle de son côté que chaque année des centaines d’Équatoriens se noient en espérant fuir en barcasse vers le Mexique puis les Etats Unis. Mais il faut bien dire que l’expérience équatorienne est saisissante et fait marcher nos petites cellules grises, comme aurait dit Hercule Poirot.
Le début du film rappelle l’originalité de l’initiative proposée en 2007 par le président Correa pour préserver l’exceptionnelle diversité écologique du parc amazonien de Yasuni (sur un hectare on y trouve plus d’espèces végétales que dans toute l’Amérique du Nord), exceptionnel également d’un point de vue ethnographique, le territoire accueillant quelques uns des derniers groupes d’Indiens isolés au monde : renoncer à l’exploitation pétrolière en échange d’un reversement par la communauté internationale de la moitié de la perte financière subie par l’Equateur. L’honnêteté intellectuelle nous oblige à dire que, depuis la réalisation du film, Rafael Correa, arguant le versement insuffisant de cette aide, a renoncé partiellement à ce projet. On voit aussi à quel point cette transition ne se fait pas sans sabotage des Etats-Unis quand on apprend par exemple que l’Ambassade des USA suspend son aide au centre de lutte contre la contrefaçon parce que l’Equateur ne permet plus que ses responsables soient nommés directement par les autorités américaines, encore en proie à des réflexes coloniaux.
Rafael Correa expose une vision socialiste moderniste qui a chassé le dogmatisme marxiste, renonçant par exemple à la lutte des classes, laissant une part de libre entreprise, gardant juste le contrôle de l’Etat sur les secteurs vitaux de l’économie. Le tout est séduisant, espérons que la suite de l’expérience ne sera pas victime de la cruauté de la réalité mondiale.